Antipsychotiques et hyperprolactinémie

Contexte et question:

…je suis moins familière avec les antipsychotiques longue action.  J’ai un questionnement au sujet d’une de mes patientes que je connais depuis plusieurs années.  Elle a 41 ans.  Lorsque je l’ai connue, elle prenait Rispéridone pour 2 épisodes de psychose et un DX de trouble psychotique NS sans aucune consommation de drogue.  Elle voulait avoir un enfant et la Rispéridone causait une augmentation de la prolactine.  J’ai donc changé la Rispéridone pour de l’Aripiprazole. Elle prenait 7 mg po die. Elle allait assez bien. Elle est devenue enceinte.  Elle a accouché en juillet 2020.  En post partum, elle a cessé l’Aripiprazole dans un contexte de psychose post partum et a dû être hospitalisée en garde en établissement 2 fois à l’automne 2020.  Ce fût très pénible pour elle, sa famille et le bébé naissant.  Depuis décembre 2020, elle reçoit le Invega Sustenna  100 mg IM aux 4 semaines et elle va super bien.  Sauf que sa prolactine est à 136, elle a mal aux seins et a de la galactorrhée.  Elle continue pour le bien de ses enfants, mais nous ne pourrons pas continuer ainsi indéfiniment.  Elle ne veut absolument pas prendre le risque d’une rechute en psychose.  Son diagnostic est maintenant schizophrénie paranoïde. Quels sont nos options ?

(Dre B. 2021-06-15)

 

Réponse:

  • il semble que le risperdal sied le mieux pour votre patiente sur le plan du contrôle symptomatologique. Vous ne décrivez pas d’autres effets secondaires autres que l’hyperprolactinémie: pas de ralentissement psychomoteur, pas d’aboulie, pas de symptômes d’allure de symptômes négatifs mais qui pourraient être le résultat d’un trop grand blocage D2. Si c’est vraiment le cas et que vous ne voulez plus explorer l’essai d’autres options antipsychotiques pour soulager quelconques effets secondaires ou symptômes résiduels persistants, l’idéal serait de maintenir le choix de l’invega sustenna mais avec quelques ajustements:
    • Diminution de la dose d’invega – 75mg possiblement et voir l’effet: il faut s’assurer qu’il n’y a pas de rechute et voir l’impact d’une telle diminution sur la prolactine et/ou
    • Ajout d’abilify PO, probablement 5mg ou moins bien que les études proposent 10mg comme “antidote” à l’hyperprolacténimie.
    • Ajout de cabergoline. C’est une option théorique, je ne l’ai jamais utilisé. Je préfère éviter de telle option, comme je préfère éviter l’ajout de benztropine à long terme pour la gestion de symptômes extrapyramidaux à long terme… chose qui ne devrait pas arriver en théorie.

Autrement, il y a toujours possibilité de retester l’abilify surtout si sa rechute n’était pas en lien avec une mauvaise réponse à l’abilify, mais à cause d’une mauvaise observance ou d’un switch trop rapide d’une molécule sédative vers l’abilify. L’observance est toujours connue lorsque la personne prend un APAP. L’abilify Maintena est la version APAP de l’abilify. Pour tenter un switch, il est possible de donner 2 APAPs de façon concurrente – en l’occurence le sustenna et le maintena. Il s’agit de faire un chassé croisé, réduire l’un et augmenter l’autre progressivement. Il y a une grand inertie pharmacologique en raison de la longue demi-vie donc un switch complet peu prendre beaucoup de temps, 1 an même. Il n’y a souvent pas d’urgence, le plus important est la stabilité de la personne et une amélioration de son état.

Il y a toujours la possibilité de tester le brexpiprazole, un cousin de l’abilify que j’aime bien ayant eu beaucoup de succès autant auprès de jeunes patients que des patients plus matures ayant fait l’essai d’autres antipsychotiques dans le passé. Il n’y a par contre pas d’option APAP pour cette molécule. Objectifs de cette molécule: ne devrait pas causer d’hyperprolactinémie, amélioration de la cognition étant aussi un antagoniste partiel de la dopamine. Voici comment je classe les antipsychotiques et comment j’explique la théorie dopaminergique aux patients avec l’analogie de l’ampoule: